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Avis du Comité de l'abus de droit fiscal dans le cadre de la création d'une SNC Luxembourgeoise permettant l'exemption de toute imposition de revenus en France

Publie le Vendredi 27/05/2016

Lorsque l'administration fiscale française déclenche une procédure d'abus de droit, conformément à l'article L 64 du LPF, à l'encontre d'une personne morale ; le contribuable peut saisir le Comité de l'abus de droit fiscal pour avis consultatif.


En l'espèce, le 19 novembre 2007, une banque britannique Y accorde un prêt à l'une de ses filiales dont le siège social est aux îles Caïmans. Grâce à ces liquidités, la filiale souscrit immédiatement et pour le même montant des actions de préférence émises par une filiale anglaise Z, indirectement détenue par la banque Y. Toujours le 19 novembre, la société Z acquiert pour la quasi-totalité de la somme prêtée un portefeuille d'instruments financiers, eux-mêmes émis par la banque Y.

 

Dans la foulé, à nouveau le 19 novembre 2007, une filiale luxembourgeoise de la banque Y crée une SARL G. Le lendemain, la SARL G et la filiale Z créent une SNC H relevant du droit luxembourgeois dont l'objet est la gestion de portefeuilles d'investissement. La Société en nom collectif SNC H est constituée de deux actionnaires : la filiale Z en qualité d'actionnaire majoritaire et la SARL G en qualité d'actionnaire ultra minoritaire.

 

Le 21 novembre 2007, la société SNC H nouvellement créée souscrit pour un montant équivalent à la quasi-totalité de son capital des instruments financiers émis par la banque Y et une banque française X.

 

Après diverses opérations financières de Swap de taux (il s'agit d'instruments financiers à terme) et à compter du 21 novembre, la SNC H est détenue à 53,57% par la banque française X et à 46,43% par la banque Y. La filiale anglaise Z détenue indirectement par la banque Y annule les actions de préférence émises le 19 novembre 2007 et rembourse l'apport de la filiale de cette banque située aux îles Caïmans, laquelle rembourse le prêt qui lui avait été accordé par la banque Y.

 

 

L'administration fiscale française a constaté que la banque française X n'avait pas déclaré la quote-part de résultat de la SNC H lui revenant dès lors qu'elle correspondait à l'activité hors de France d'une société de personne étrangère et qu'elle n'entrait pas dans le champ d'application de l'impôt sur les sociétés, conformément à l'article 209 du CGI. En outre, l'administration a estimé que la prise de participation dans la SNC H ne répondait à aucune motivation économique mais correspondait à un montage ayant un but exclusivement fiscal dont le seul et unique objectif était l'exemption de toute imposition de revenus en France. Ainsi, elle a mis en œuvre la procédure de l'abus de droit fiscale et la société X a saisi le comité de l'abus de droit fiscal pour avis.

 

Le comité a rendu un avis non conforme à la décision de l'administration fiscale française le 27 novembre 2015. Il est ici intéressant de rappeler que l'abus de droit peut être caractérisé soit par la fraude à la loi, soit par fictivité.

 

* En l'espèce, le comité relève que l'abus de droit par fraude à la loi ne pouvait pas être caractérisé car les éléments cumulatifs caractérisant ces abus, objectif et subjectif, faisaient défaut.

 

En effet, le critère objectif se traduit par la recherche d'un bénéfice d'une application détournée des textes. A ce titre, le comité affirme que la réalité des flux financiers et de l'importance de l'aléa qui entourait l'opération (la société français X avait accepté de supporter davantage de risque de la banque Y dans l'espoir d'en récolter davantage de profits) ne caractérisait pas un montage ayant un but exclusivement fiscal et contraire aux objectifs poursuivis par les auteurs de l'article 209 du CGI.

 

 

Enfin, le critère subjectif qui se caractérise par la recherche exclusive d'un avantage fiscal ne pouvait pas non plus être retenu en l'espèce. A ce titre, la société SNC H a été valablement constituée, ses organes sociaux fonctionnent efficacement, le choix de la forme juridique a été pensé au regard des intérêts des deux associés en présence et enfin la société dispose de moyens bureautiques, de locaux et de personnels qui lui sont propres.

 

* En l'espèce, l'abus de droit par fictivité ne pouvait pas non plus être caractérisé car la société SNC H a une substance.

 

 

En conclusion, dans son avis consultatif le comité de l'abus de droit fiscal, rendu le 27 novembre 2015, confirme la définition et les éléments constitutifs d'un abus de droit. Cet avis et donc conforme à la jurisprudence de la Cour de justice de l'union européen et à celle du Conseil d'Etat.

 

 

Voir également nos actualités :

 

La Cour de Justice de l'Union Européenne délimite la frontière entre la fraude et l'optimisation fiscales


Changement de forme juridique d'une société et abus de droit


Intégration fiscale et intégration sauvage

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