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La pratique des donations de titres de société suivie d'une cession validée par le Conseil d'Etat à certaines conditions

Publie le Jeudi 05/06/2014
Dans un arrêt n°353822 en date du 9 avril 2014, le Conseil d'Etat a réaffirmé qu'un dépouillement immédiat et irrévocable donnant lieu à une donation suffisait à exclure tout abus de droit.

En l'espèce, un couple de contribuables fait don les 4 et 7 octobre 2003 à chacun de ses trois enfants de la nue-propriété de 152 parts d'une société civile immobilière (SCI) et de 12 031 actions d'une société anonyme (SA) qu'il possède. Ces donations sont assorties de clauses d'inaliénabilité. Les 23 et 24 octobre 2003, les contribuables et leurs enfants apportent l'ensemble des titres à neuf sociétés civiles financières dont la cogestion revient aux parents. Enfin, le 31 octobre 2003, les parts de la SCI sont acquises par la SA, dont la totalité des actions est cédée par les sociétés civiles financières à une société tierce le même jour.

L'Administration remet en cause la sincérité de ces actes et lance une procédure de répression des abus de droit afin de percevoir l'imposition sur la plus-value des titres sociaux cédés. Les intéressés, dont la requête en décharge de cette cotisation supplémentaire est successivement rejetée par le Tribunal administratif de Poitiers puis par la Cour administrative d'appel de Bordeaux, se pourvoient en cassation.

Le Conseil d'Etat censure la décision de la Cour administrative d'appel, laquelle avait établi un abus de droit après avoir jugé que les donations litigieuses ne s'étaient pas traduites par un dépouillement immédiat et irrévocable. Il rappelle que ni la rapidité de l'enchaînement donation/cession, ni les clauses d'inaliénabilité, ni les pouvoirs étendus de gestion et de décision des donateurs usufruitiers, ni les excédents de distribution des bénéfices perçus par ces derniers ne sont de nature à nier l'existence d'un dépouillement immédiat et irrévocable et donc d'une donation des contribuables en faveur de leurs enfants. L'abus de droit n'est de ce fait pas qualifié.

Cette solution fait écho à une autre décision en date du 30 décembre 2011 (CE, 30 déc. 2011, n°330940, Motte Sauvaige) dans laquelle le Conseil d'Etat estimait que la donation de titres d'une société placés sous le régime de report d'imposition des plus-values puis leur cession à une société détenue par le donateur ne caractérisaient pas un abus de droit. Le Conseil d'Etat avait jugé que les clauses d'inaliénabilité assorties à la donation-partage litigieuse étaient bien « temporaires et justifiées par un intérêt légitime et sérieux » (article 900-1 du Code civil) du fait, en l'espèce, de la minorité des enfants et de la nécessité de préserver le patrimoine familial et n'ôtaient pas à l'acte son caractère de donation. Le Conseil d'Etat confirmait par ailleurs que le court délai entre la donation et la cession ne constituait pas un comportement frauduleux.
Dans l'affaire du 9 avril 2014, le Conseil d'Etat va plus loin puisqu'il s'agit d'une opération de donation-apport et cession de titres à un tiers. 

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